Sung-Pil CHAE

Chae Sung-Pil est un artiste sud-coréen vivant actuellement à Paris, en France. En combinant dans ses peintures la philosophie et les traditions orientales à la « quête de nouvelles idées » exprimée dans l'art occidental, Chae Sung-Pil est rapidement devenu l'un des artistes coréens les plus connus et les plus respectés. La palette terreuse de Chae Sung-Pil, inspirée par ses nombreux voyages autour du monde, diluée avec de l'eau et mélangée à de la colle, crée une texture abstraite sur une toile rappelant la terre. La terre est specialement préparé sur un papier mulberry et souvent melangée à de l'encre chinoise et de la poudre d'or et d'argent. La mixture organique est ensuite appliquée à l'aide de large pinceaux ou de ruissellement d'eau qui interagissent avec la terre en glissant le long de la toile.

Chae Sung Pil est un doctorant des arts plastique de l'Université de Paris. Il a obtenu son MA et BA à l'Université Nationale de Séoul et un deuxième Master l'Université de Rennes. De nombreuses expositions personnelles lui ont été dédiées en France, en Corée du sud et en Chine et il a participé à la London Art Fair de 2014, à Art Basel en 2012 et à la London Art Fair de 2011.

«"La terre" est le maître-mot de CHAE Sung-Pil. Il en parle abondamment et sa peinture en témoigne à pleines surfaces : ses pigments sont des boues lumineuses. Mais il ne s'agit pas d'une terre originelle, de cette glèbe première que d'aucuns, comme Giono ou Péguy, ont valorisé non sans nostalgie. CHAE Sung-Pil, quant à lui, conçoit la terre comme un foyer ardent, le matériau même des forces cosmiques. La terre en est totalement déterritorialisée, très légère et fluide, aérienne. Il n'y a plus d'horizon mais ce n'est pas pour autant, comme y insiste CHAE Sung-Pil, par renoncement à une image terrestre, ce qu'il appelle "l'espace de la terre".

Cette peinture oscille constamment à des vitesses et des angles d'approches variables, entre un art du geste et de la trace, une expérimentation des coulées de la matière et une suggestion de paysages. Ses tableaux ne sont cependant en aucun cas des paysages au sens classique car ceux-ci risqueraient à tout moment d'être ceinturés, cadrés et même surcodés par quelque fenêtre figurative organisatrice. Il aura fallu le génie d'un Cézanne ou d'un Monet pour s'en évader et faire de la terre paysagée des ensembles de lignes de forces qui la traversent, la fragmentent, la liquéfient. C'est dans leur direction qu'il faut situer CHAE Sung-Pil, plus que selon l'héritage plus proche d'artistes contemporains qui ont utilisé la terre comme matériau.

Bien sûr, une toile de CHAE Sung-Pil ne ressemble pas à du Cézanne. Mais il ne s'agit pas de ressemblance ! Mimer Cézanne serait produire de ces affreux simulacres postmodernes dont nos cimaises d'art contemporain sont encombrées. Et CHAE Sung-Pil se méfie de même de toute mimétique illusionniste de la nature. Il est d'une singularité absolue, tout en reposant la problématique du paysage moderne d'une façon expérimentale sans référence directe aux maîtres, mais selon une complicité intérieure avec eux. C'est inclassable, et pourtant de notre temps, explorant un versant vital de notre temps quasi obscur et soudain mis en lumière.

Contemporain et moderne ? Lorsqu'il évoque confraternellement des peintures qui l'ont aidé à se trouver, il cite l'art Song aussi bien que Sam Francis... Cézanne évoquait Poussin, l'art roman et Bouddha. Un Richard Long ou un Tapies, selon CHAE Sung-Pil n'ont pas effectué la même démarche que la sienne ! Disons que ces matiéristes de haut niveau nous placent face à des frontalités strictes. Impossible de franchir leurs planéités. Cela demeure mat et bi-dimensionnel, sans images. »

Pierre Sterckx